“Il y a des gens qui ont une piscine, moi j’ai des lamas !’’. Je suis né en Ardèche dans une famille de paysans, et j’ai assisté en première ligne à l’exode rural des jeunes qui partent dans les villes : les maisons qui ferment, les terres laissées à l’abandon, la forêt qui grignote chaque année de l’espace sur les villages, la vie sociale qui disparaît. Aujourd’hui, j’ai choisi de photographier ceux qui font le chemin inverse : nouveaux bergers, éleveurs, révolutionnaires à leur manière. En montrant leurs visages, les espaces de vie, les intérieurs de maisons, caravanes, cabanes, travaux manuels, je m’attache à témoigner de leurs choix de vie. Robert consacre une matinée entière à se laver, puisqu’il faut allumer le poêle et faire chauffer l’eau du bain. Jeremy n’a pas de terrain propre et guide son troupeau de parcelle en parcelle, au bon vouloir des propriétaires, et peu importe la météo. Edith et Jean-Marc accrochent à chaque disparition d’une de leur chèvres ses vestiges dans “l’arbre à crâne”. Chacun à leur manière, ils réinventent une nouvelle manière de vivre avec la nature. En mettant en image ces hommes et ces femmes, j’interroge le devenir de nos territoires mais aussi les consommateurs que nous sommes, à l’heure où le rapport à l’argent, à l’alimentation, à la maison et à l’autre sont des questions présentes dans toutes les têtes.
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